Sortie escalade du 13-14 Septembre aux dentelles de Montmirail par Bertrand S

Le bal des couineuses

Aoursiens de France et de Navarre, ce we aux dentelles de Montmirail a encore de quoi vous donner des regrets.

D'abord, l'endroit est magnifique. Les dentelles sont comme un signe de rébellion de la nature qui aurait décidé de planter une échine dorsale dans un paysage qu'elle jugeait trop plat. Dans la foulée, elle a du se dire, puisque j'ai un peu de cailloux en rab, je vais aller planter un mont ventoux à côté aussi, comme ça on verra de quel bois je me chauffe. Et pourtant, il ne s'agit pas d'un travail bâclé puisque dame nature a tracé de très jolies voies là-bas en pensant aux grimpeurs qui viendraient s'user les doigts 2 millions d'années plus tard (c'est ce qu'on appelle le sens de l'anticipation). Même si on encore entendu Lolo jurer que la dalle est une mauvaise invention, il faut reconnaître qu'il y a de superbes lignes, pures et longues (35 m est un standard aux dentelles). Et puis les dentelles, ça n'est pas Virieu-le-grand. Le calcaire peut complètement changer d'aspect en quelques mètres. D'un secteur à son voisin, on passe de la dalle lisse penchée, à du calcaire à goutte d'eau raide voire déversant. Pour finir, de vous écoeurer, je pourrais vous dire que chaque face des dentelles se grimpe et qu'il y a toujours moyen de trouver un coin pour grimper quelles que soient la température et la force du vent. Je pourrais aussi vous dire que le site est idéal pour tous les niveaux de grimpe. Mais bon, je vais m'abstenir, je pourrais vous mettre en colère. Le décor étant planté, je ... ah ben non pas tout à fait, j'ai oublié de mentionner le camping. Propre, tranquille, proche des falaises et dans un village très mignon, pour 13 euros à 4, qui dit mieux (si je vous énerve là, faut le dire) ?

Le décor étant planté donc, je peux maintenant m'occuper des acteurs et de l'histoire. Les films de genre ayant tendance à disparaître, j'ai du mal à cataloguer ce we. Pour tout vous dire, j'hésite entre la comédie et le drame. En tout cas, pour le titre, il n'y a pas d'ambiguïté : le bal des couineuses. Ce we encore, le caillou a été prétexte à l'exacerbation des sentiments. Nous avons tout vécu : des joies, des peines, des cris, des revanches. Bref, on a refait "autant en emporte le vent" (ou plutôt autant en emporte le mistral) aux pieds des voies. Le meilleur moment de cette épopée étant sans aucun doute le chant des couineuses a capela Lolo et Sophie, chacune dans leur voie, insultant, à tour de rôle le rocher, l'ouvreur, l'assureur et elles-mêmes. Bref, un grand moment de cinéma avec des actrices au sommet de leur art dans une comédie sportivo-musicale à la mesure de leur talent.

Alors, ce portrait idyllique de ce we aux dentelles ne cache-t-il pas quelques imperfections ? Pour tout dire, un des moments les plus importants du we a été tout bonnement gâché par un pizzaïolo radin. En effet, est-il acceptable d'avoir encore faim après une pizza 3 fromages et des profiteroles au point de devoir commander un chocolat liégeois ? Une pâte trop fine, une pizza qui ne déborde même pas de l'assiette, Lolo qui arrive même à finir la sienne et voilà comment on rentre frustré d'une journée de grimpe. Plus sérieusement, nous avons aussi moyennement apprécié d'être accompagné par les coups de fusil des chasseurs pendant le petit dej' et pendant qu'on grimpait le dimanche matin (heureusement qu'à midi les chasseurs sont suffisamment bourrés pour pioncer et nous foutre la paix). bon et puis, on a aussi un peu regretté que le moindre petit village typique soit pollué en son centre par des dizaines de pancartes et commerces de vendeurs de vins. Gigondas, par exemple, est un mignon petit bled sauf quand on rentre à l'intérieur. Ce n'est pas moins de 1 pancarte tous les 2 mètres (et puis discrètes les pancartes, vous imaginez) vous invitant à déguster du pinard. Du coup, écoeurés, on n'en a même pas acheté, étonnant non ? Enfin c'est pas grave, comme le site des dentelles est énorme, on reviendra grimper et cette fois, on ira dans les caves moins touristiques.

Bertrand.


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