Sortie canyon-escalade du 01-02-03-04 Mai par Bertrand S |
C’est bien connu, les grimpeurs sont des autistes. Ce we encore, ils n’ont fait qu’entretenir leur réputation. Alors que Jacotte, plus à l’aise que jamais dans son fauteuil de présidente, réussit magistralement à organiser un we avec plus ou moins 30 personnes et des gamins de tous horizons, dans un coin perdu des Alpes de haute Provence, les 4 grimpeurs exclusifs se sont isolés pour pratiquer leur activité. Du coup, faisant parti du lot, j’aurais bien du mal à relater les aventures canyonesques des 26 autres. Jacotte, tu vas devoir te farcir ton propre compte-rendu ! C’est bien connu aussi, les canyoneurs sont des feignants. Non seulement, ils se lèvent tard mais en plus ils ne font que descendre en rappel quand d’autres utilisent toute leur énergie à se hisser vers le haut. Là encore, ce n’est pas ce we qui va contredire ce lieu commun. Tant qu’on est dans les clichés, en voici d’autres qui se sont vérifiés : Bertrand est un râleur (par principe), Jacotte ne respecte pas les horaires (début en canyon à 17h et retour à plus de 21h), la voiture de Sophie est gentille (malgré ces 200000 km, elle n’a pas bronché sur la piste), Nathalie picole (presque plus que des encadrants en canyon).De toute façon, comme il s’agit du Verdon, on ne va pas faire dans la dentelle. Là bas, tout est énorme : les falaises, les canyons (enfin je crois), les kilomètres de piste en terre qui mènent au gîte. Je sais que je vais me répéter mais la première pensée qui me vient à l’esprit quand on parle du Verdon c’est : « le Verdon c’est … verdonesque ». Ben oui, c’est un lieu où l’histoire, les parois, la distance entre les points (pourtant, on était venu l’année dernière à la même époque et on savait que c’était pas la saison des spits) et la raideur des voies sont incomparables. Ca impressionne à un point que la toute première fois qu’on se lance dans le rappel pour atteindre le pied des voies est un souvenir qui ne s’efface pas comme le premier flirt, les résultats du BAC ou la première biture. L’ambiance conjuguée à la difficulté des grandes voies laissaient donc présager quelques moments inoubliables. Effectivement, ça a été un grand we de grimpe. Un de ceux où on est fier de soi d’avoir sorti les voies et où on engrange du mental et du physique (à un point qu’on a même plus peur d’aller engueuler les potes d’Edlinger qui sont garés n’importe comment devant la superette de la Palud). Bref, un we palier. On ne s’est d’ailleurs pas contenté de grimper des voies de qualité, on a aussi grimpé en quantité, c'est-à-dire 4 jours sur 4 et avec beaucoup de longueurs chaque jour. Incertains pour la météo du vendredi, Sophie et moi sommes allés directement en grande voie le premier jour. On cherchait le calme, la solitude, le sentiment d’engagement, bref tout ce qui fait une grande voie. En fait, nous sommes tombés sur une colonie d’italiens bruyants. Entre le sommet et le jardin des écureuils, ça montait et descendait dans tous les sens. C’est même une chance si nous n’avons trouvé personne dans Cocoluche, notre voie (5c/6a max mais sur 6 longueurs). Le temps de prendre Lolo et Guillaume en photo en plein effort dans l’arabe dément (2 longueurs 6a+) et d’éviter quelques italiens descendant en rappel sans trop savoir ou, nous sortions la voie pour l’heure du déjeuner. L’après midi, nous avions encore soif de grimpe donc nous sommes allés faire 2 longueurs vers l’Escalés avec toujours ce bruit de fond italiens. Le vendredi était censé être un jour de repos puisqu’il devait pleuvoir. Comme il arrive au dieu de la grimpe d’imposer son point de vue en Olympe, nous avons quand même pu nous faire une grosse demi journée de couenne à la Félines. Ca a beau être de la couenne, l’équipement et les cotations sont ceux du Verdon mais la beauté des lignes également. Pas de grosses croix donc mais beaucoup de plaisir dans des longueurs de 30m. Le samedi, les 2 cordées étaient bien décidées à en découdre avec « pour une poignée de gros lards », 6 longueurs dont 4 dans le 6a+. Malheureusement, un jour de pont par grand soleil, il vaut mieux éviter d’arriver après 9h dans les rappels. La descente et la montée étant plus que saturées, nous avons trouvé un plan B plus qu’honorable : des voies de 3 grosses longueurs peu fréquentées au belvédère de la dent d’Aïre. A part quelques italiens et des stéphanois (qui nous ont suivis pendant 3 jours sur 4 à moins que ce ne soit l’inverse), nous avons pu tranquillement enquiller 6 longueurs de 30 m entre le 6a et le 6a+ dans un rocher magnifique. On a trouvé de tout là bas : dièdre, fissure, dalle, léger devers, trous, gouttes d’eau, écailles, arbres, dégaines (ah il faut pas le dire ça ?). Pour éviter les déboires du samedi, nous entamions avant 9h le dimanche les rappels de « pour une poignée de gros lards ». Nous avons eu raison car les stéphanois sont arrivés peu après et se sont rabattus sur une voie à côté. Une fois dans la voie, nous avons vite oublié le lever pénible à 7h (et le coucher la veille à minuit à cause d’un groupe de canyoneurs voulant s’initier au canyoning nocturne). Les gros lards, c’était vraiment l’apothéose du we : pas d’italiens, pas de foules, de magnifiques longueurs, de l’engagement et de la continuité, bref du Verdon quoi. C’est sur, dans cette voie, on a éliminé l’alcool, les biscuits apéro et les excès de tous les soirs précédents (j’ai les noms de ceux qui ont pris 3 fois du tajine la veille), même qu’il nous restait une place pour déguster, que dis-je : engloutir, une glace à la sortie. Après ces 4 jours intensifs, il nous restait juste assez de force pour conduire la voiture jusqu’à Grenoble, ouvrir la porte de la maison et se vautrer dans le lit. Bertrand. |